Marta BĂRBULESCU




Photos sans cadre

Ils sont ensemble depuis si longtemps
Qu’ils se sont presque oubliés
L’un
L’autre.
Parfois,
Il s’en souvient
Et lui dit:
– Tu devrais t’en aller encore
L’espace d’un brin d’herbe.
D’une fleur,
D’une saison!
Le temps s’écoulerait plus lentement
(N’importe comment, il faut l’arrêter!).

Ton départ me planterait
Des arbres
Dans l’îme!
Les graines donneraient des feuilles
Et des fruits.
Et, de l’oubli,
Tu viendrais en un oiseau chanteur!
Moi j’aurais
La sagesse de la terre.

Sous des paupières il neige
Avec de la naphtaline!
Lorsque j’ai compris

Ainst, soudain, j’ai compris
Le lever du jour d’été!
Peut-être parce que je n’avais été qu’un épi
Parmi tant d’autres!
Et je veillais pour que les pavots rouges
– Le jour présent, le lendemain –
Ne périssent pas!

Et je n’entendais absolument rien.
Sauf le lourd frémissement
De la sève,
Répandu au-dessus des cimes
Des vieux arbres, –
Au-dessus des forêts lointaines.
Et je veillais!

Et je ne voyais que le Temps.
Libérant les pavots en nous.
Afin que le soleil
Soit balance
A la terre des ancêtres,
A la pensée regardant en avant
Et en arrière...

Losque j’ai compris
J’étais plus
Tel le vol des oiseaux blancs,
Secouant le haut du lever
D’un jour d’été.


Quand je m’incline

Sans doute sommes-nous comme les peupliers!
Le vent souffle à travers le cri des sèves
Et nous poussons jusqu’à rendre de notre front
                le ciel serein
Jusqu’à ce que la pierre plongée dans la pierre
Engendre la rotation des autres peupliers.
C’est l’herbe qui me met au monde
Et c’est la feuille qui m’effiloche,
Et les eaux me demandent le splendide
            mouvement,
Tel le prolongement du souffle dans les cordes,
Quand la musique entame un dialogue
Et se complète en tonalité.

Sans doute sommes-nous comme les peupliers
Dedans et en dehors de la cité,
Naissant avec chaque jour
Ensable racine, feuille,
Quand nous nous inclinons pour accueillir le
                    soleil
Tels les bédouins le signe de l’oasis...

Saisons
Il monte l’échelle et il rit,
Il passe par le sang et il rit,
Il dort dans la chair et il rit.
Il descend l’échelle et il se tait,
Il se glisse dans le sang et il se tait,
Il gele dans son propre corps
Et il se tait.

(din volumul L’herbe Rousse,
cu o prefatã si prezentare de Gérard Leroy)

Traduceri de Ion Florin DUMITRESCU


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