Daniel CORBU



 
 
 
 
 


POEME DE MINUIT

Meme l’alphabet dans lequel je vous parle est une tristesse.
Qu’est-ce que tu est o mon ame?
sinon une reunion de nuits une coalition
de chuchotements?
Au minuit les pluies cliquetant dans ma memoire
je me donne a toi tout entier fleur du desastre
j’entre en moi comme dans un pays de miroirs
    mouvants
je me lis en meme temps que toi hypocrite lecteur
le souvenir enterre en profondeur surgit comme les vieux
textes des feuilles de papyrus.
J’entre en moi comme dans un pays
de miroirs mouvants. Les fenetres dechirent la nuit.
Tout est comme une salve de canon
dans un village de Bougogne en automne.
Qui dois-je affronter dans ce labyrinthe de paroles?
 

SUR LES ROUTES DU CIEL

Toujours plus loin de toi Odysseus Elytis
toujours plus loin
dans les forets claires du Nord
a travers les nuits blanches tatonnant
tourmente par les routes
glorifie par la tempete et par des Dulcinees passageres
comme le Chevalier de la Triste Figure.

Toujours plus pres de toi Odysseus Elytis
a genoux je vieillis parmi les metaphores
sur les routes du ciel brillent des reverberes des ailes
usees par le vol
et je ne sais pas pourquoi ce matin
plus clair comme la Mer Egee
en pensant a toi comme a un Olympe devaste
je ne peux rien repondre a ceux qui me demande
qui va decrire le mieux le lointain.
 

LE NAVIRE

Chaque jour j’ai travaille au navire a sept voiles
comme a une grande construction.
Je lui ai mis avec soin la proue la teugue le babord.
Les journees passaient - prostituees echauffees
pour de braves amants. La jeunesse
ainsi est passee.
Les hommes venaient - sortes de Jesus asthmatiques:
“On dit qu’il batirait un navire
mais on ne voit rien - disaient ils -
peut-etre que c’est un navire de paroles”.
Jour et nuit j’a vaincu l’empire du doute
je lui ai mis avec soin la poupe la misaine
    les amarres.
La jeunesse ainsi est passee.
“Entrez dans la navire a sept voiles
le vent est favorable et les horizons nous attendent
la voila briller de toute ses blessures!”
Mais les hommes tardaient d’entrer
“Ce n’est pas un navire comme les autres
disaient-ils touchant de leurs mains la carcasse
de lettres ardentes
c’est un navire de syllabes
c’est un navire rempli de larmes”.
 

LA CORDE NOIRE

Tu veillis sans t’en apercevoir
en cherchant toujours des metaphores pour
  la gloire d’un texte
mouchete d’azur d’idees vermillon
de la rose apocalypse du moment present.
Tu etais jeune et tu sortais des intrigues et
des griffes pour dechirer les fetes
chaque jour tu regardais la corde noire
   LA CORDE NOIRE.
Tu apprenais:
l’art c’est un petit truc qu’on applique
  aux cellules orgueilleuses.
Tu apprenais:
Vita impendere verso. Consacrer ta vie a la verite.
Dans une chambre a murs livresques
dans une ville bavarde
chaque jour tu regardais la corde noire
   la corde noir.
MAIS VENEZ PLUS PRES VOUS, LES DESESPERES!
D’ici on a une perspective meilleure surtout.
Le cafard egare a travers la steppe.
 La petitesse.
  L’idiom.
   La couverture.
La salive crucifiee sur de vives ovations.
 

ELLE

C’est elle qui me console quand je pleure sans raison apparente
c’est elle qui enroule autour de mon cou l’echarpe
rappelant un serpent kaki
qui admoneste mes grossieretes de langage
ou promene un atomiseur sur mon Apocalypse
qui appuie la pedale de mon courage et qui me protege
de ma propre froidure.
C’est bien elle qui me delivre des mauvais anges des pharaons
de l’air contre lesquels je combats selon ma donquichottesque
     impertinence
et c’est touhours elle qui me corrige telles des epreuves manuscrites
     durant les nuits
où il lui semble que je mets trop peu de temps a mourir.

(Traduceri de Mira Iosif-Fichman)


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