POEME ROMÂNESTI ÎN LIMBI STRĂINE


Al. PINTESCU

Poeta artifex 1

Jeu de lueurs sur la rivière gelée,
jeu de lueurs – fantasmes de la sagesse
dans son frac emprunté
du pingouin empaillé
passent les croque-morts portant les signes de la race.

Le bois s’habille en noir-violacé
les pies imitent la tempête :
vas-y, aie du courage, âme-laquais,
ne te prépare pour prendre la poudre d’escampette.

Tout ça n’est qu’un pâle décor
pour la scène pénetrée par la bise et le vent
tel que le ciel traversé par le météore
est prêt à inonder la terre à l’instant.

C’est en vain d’échapper de son embrassement
on est lié à la raie de l’horizon
par des cordes tirées par des grues en nuées
les érinnyes vont t’atteindre furieusement !

On ne peut pas plonger comme un vétitable acteur
que dans une larme tissée en songe
murmurant les chansons de Maldoror
avec la tête penchée vers l’abîme…

Les outils du Jardinier

Le Jardinier range ses outils :
s’approche la saison de l’herbe et des fleurs,
il faut nettoyer les gazons votifs,
il faut barioler en émails colorés
les vases crépusculées par la rosée de l’espoir ;
les herbes sans remède s’éveillent à la vie
les chaudrons magiques attendent leurs bouillons :
le gui, le romarin, le colza flétri, rézéda,
la camomille étoilée (le capricorne paîte le chévrefeuillle) ;
oui, le Jardinier range ses outils maintenant,
les étend, brillants, sur la table de sapin
sous l’arbre dont l’essence je ne reconnais pas
(on n’est pas issu de la même racine !) ;
vois-tu, bien rangés, les crayons,
les plumes, le stylo et une machine à remailler les idées
(ayant des touches au lieu de roues), gommes minuscules
des tampons, encriers pleins de chimères colorées,
des papiers noirs au palais faussant tous les sens,
filtrés, un par un, parmi les feuilles blanches
avec des messages cryptiques…
… le Jardinier range ses outils sans se soucier
que son voisin, l’ingénieur, est parti acheter
du chou, que sa femme donne de suspects coups de téléphone,
et que les autres le regardent en mépris
qui fait bon ménage avec l’ignorance,
sans se soucier des habits salis
du bambin ou que son ami
(le prosateur) a fait ressorti encore un livre
insipide, et qu’un autre (cirquer !) lui enfonce
entre les omoplats une série de couteaux
avec une dextérité éblouissante, le Jardinier
range ses outils, ses ébauches, ses serviettes,
ses tristesses, saisons, ses amours, trahisons,
entrant fermemnt dans les travaux
de printemps…

Signal

Je sais ce qui sera
si tu tire le signal
et le temps va s’arrêter glissant
de rails en bruit de ferailles
agressant tes cellules avides d’éternité
te laissant le goût de l’effroi
dans tous les pores, la sensation de la peur
dans les papilles gustatives,
t’arrangeant dans les classeurs
de la mélancolie.

On oublie vite tout ce qui se passe :
le froid t’enveloppe lentement,
de la tête jusqu’aux pieds, le tronc
est invadé par des écrevisses minuscules
et on sent l’herbe qui frémit
dans le sofa qui s’écroule
par dessous…
Radiografia zăpezii (boeme), Ed. Helicon, 1997
Traduit par Claudia SOROCEANU

 

 

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