POEME ROMÂNESTI ÎN LIMBI STRAINE

   

Spiridon POPESCU

 

 

COMME IL RENTRAIT CHEZ LUI

 

…Comme il rentrait chez lui, las de mélancolie,

Le poète s'arrêta et, à sa femme, il dit:

 

„Ma chérie, prends la clé et va vite ouvrir

Pour qu'au seuil de la porte ne s'attardent les souvenirs.

Moi, je reste faire la queue (j'ai pris mes gages), encore

Peut-être, cette fois-ci trouverai-je un kilo d'mort”…

 

* * *

 

Je suis en neige, les bonshommes de feu

Pourraient me faire fondre quand la nuit

Les couvrirait, c'est pourqoi je t'en supplie;

Prends un robot à ma place, Dieu.

 

Lui, il est fait en fer, le feu le lèche,

- Bête des enfers – on le frappe, on l'engueule

Et chaque bête ouvre une large gueule

Vers les humains, comme une maudite flèche.

 

 

LA CONFESSION D'UN VOLEUR

 

La pensée – ruse perfide, je m'approchais de toi

Pour voler ta tristesse, et pour m'en enrichir

Mais dès que j'ai voulu entrer dans ton âme-lyre

Un gros chien éffrayant s'arrêta devant moi.

 

J'ai eu peur, bien sûr, et pour la première fois

Vaincu et les mains vides, je suis rentré chez moi.

 

 

FRANÇOIS VILLON JE SUIS

 

François Villon je suis, à ma naissance

D'enfant bâtard se levèrent les potances

Avec des cordes pourries d'impatience

À me serrer comme une fleur qui danse

Au vent. Seigneur, ne leur donnez pas de pouvoir

Sur moi; Vous qui m'avez levé jusqu'aux étoiles

D'avoir apprécié ma poésie…

Hélas,

Au lieu de Vous montrer de reconna î ssance

Au lieu de Vous donner Foi et Croyance

Que fais-je, moi – le brigand que je suis? –

Voleur de grand chemin, je vole Vot' Saint-Esprit.

 

 

PETITE ANNONCE

 

Je donne asile à un ange en chagrin

Un ange que Dieu chassa du Paradis

Je lui offre à manger, à boire, un lit

Sans rien lui demander. Enfin „rien”

 

C'est pas exactemant le mot qu'il faut:

Je voudrais qu'il déclare à mes voisins

Qu'il est mon propre clair alter ego.

 

 

ET COMME AU FOND DE MOI

 

Je me jetai en moi tout habillé

Si j'avais su quel lac profond y g ît …

J'aurais pu à coup sûr m'y noyer

Si je ne savais pas nager ainsi…

 

Ce lac étrange, je ne le savais guère…

D'où il venait, comment s'est-il formé?

Un jour, bien tard j'avais appris: naguère

Sur le monde, à des larmes il pleuvait…

Et comme en moi le gouffre était plus grand

Qu'aux alentours, les rivières toutes

S'y sont précipitées joyeusement

En y formant ce lac qui me déroute…

 

 

EMINESCU

 

Lui, il naquit de notre espoir de na î tre,

De l'orgueil de nos mots de miel

Pas de ventre de femme, mais peut-être

De ce large ventre bleu du ciel.

 

Personne ne le vit emmailloté

Comme tous les nouveau-nés de mon pays

Au lac de nénuphars il fut lavé

Son nom lui fut l'unique humain habit.

 

Chez lui les Parques n'osèrent pas se montrer

Qui était-il, on le savait aux cieux

À ses noces ne jouèrent ménétriers

Il ne porta jamais au doigt anneau.

 

Il ne fit faire sur la terre maison

Sa demeure sous le ciel fut son être

Pour le sommeil – un lit de vert tilleul

Aux fleurs fragrance – parfum de bien-être.

 

Ce prince, car il fut l'un des princes les plus rares

Pouvait apprendre toute chose par coeur

Sauf un rien du tout: le grand savoir

Des êtres de la terre: la mort…

 

 

DIEU, SI TU ES MON AMI

 

Dieu, si tu es mon ami

Comme tu l'affirmes tout le temps

Donne à la mort commendement

Qu'elle laisse en vie mes parents

Et qu'elle prenne plutot mon cheval

 

Dieu, si tu es mon ami

N'écoute pas tous les vauriens

Et dis à la mort qu'elle prenne –

De par ton commendement –

Mon cheval, pas mes enfants.

Dieu, si tu es mon ami

Ne brise pas ma destinée,

Donne à la mort par écrit

Ordre qu'elle vienne chercher

Mon cheval, pas ma bien-aimée!

 

Dieu, si tu es mon ami

Comme tu le prétends assez

Mouille ta plume dans l'encrier

Et, avant d'aller t'coucher

Donne á la morte commendement

Pour qu'elle ne l'oublie pas:

 

Sous le ciel de cendre, gris

Quand elle aiguisera la faux

Qu'elle vienne la planter en moi

Et qu'elle laisse mon cheval en vie.

Traduit par : Paula ROMANESCU

 

 

 

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